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Photo du rédacteurDaniel ZARCA

Cancers du sein : moins de chimiothérapies


Oncotype DX est un test génomique qui analyse le comportement de 21 gènes dans les cancers du sein (on appelle ce type de test : test génomique). Dès qu’il est utilisé, nous savons qu'il diminue les indications de chimiothérapie de 25% à 35%. Pour la France cela signifierait une diminution d’environs 8 000 chimiothérapies par an.

Expérience internationale

Très utilisé dans le monde (500 000 tests réalisés), le test n’est pas encore remboursé en France, même si des signaux encourageants commencent à nous parvenir. En revanche, plusieurs pays Européens (Grèce, Irlande, certaines régions d’Espagne…) procèdent à un remboursement total ou partiel du test Oncotype DX.

Cette politique de remboursement venant de nations en difficultés économiques peut étonner. Cependant les études médico-économiques effectuées pays par pays montrent que l’usage du tests est au minimum neutre pour les diverses assurances maladies ou parfois même bénéficiaires. En effet, malgré son prix (un peu plus de 3000 Euros), il permet probablement d’effectuer des économies de dépenses, en limitant les coûts directs ou indirects liés aux chimiothérapies.

Freins à l'utilisation du Test Oncotype

Le problème de l’utilisation du test n’est donc pas financier, mais purement médical. Jusqu’à présent, les preuves apportées par la société Genomic Health, qui commercialise le test, ne convainquaient qu’une partie de la communauté médicale Française. Les études - pourtant très rigoureuses - réalisées par les sociétés de cancérologie Nord-Américaines (qui avaient mené les études de validation d’Oncotype DX) n’avaient trouvé qu’un écho partiel en France. Sans entrer dans des détails trop techniques, le débat portait essentiellement sur le niveau des preuves apportées.

Les premiers résultats de l’étude TAILORx qui viennent d'être dévoilés au dernier Congrès Européen de Cancérologie de Vienne, puis publiés dans le New England Journal of Medicine (NEJM) sont sans appel. Ils démontrent de manière éclatante ce que nous laissait percevoir toutes les études réalisées auparavant.

Résultats de l'étude TAILORx

Pour comprendre cette révolution qui se prépare, il faut entrer dans les détails de l’étude. L’essai TAILORx a concerné plus de 10000 femmes volontaires (essentiellement Nord-Américaines) atteintes de Cancers du sein hormono-dépendants (qui représentent 60 à 70% des cancers traités). Pour être éligible à l’essai, il fallait que les ganglions axillaires prélevés au cours de l’intervention ne soient pas atteints.

Les patientes étaient classées en 3 groupes en fonction des résultats du test Oncotype DX. Bas risque, risque intermédiaire, haut risque. Les patientes à bas risque recevaient après l’intervention une hormonothérapie. Les patientes à haut risque recevaient une chimiothérapie puis une hormonothérapie. Les patientes à risque intermédiaires étaient tirées au sort : un moitié recevaient une hormonothérapie seule, l’autre moitié recevaient une chimiothérapie puis une hormonothérapie.

Les résultats publiés dans le NEJM portent sur les patientes du groupe à bas risque (dont aucune n’a reçu de chimiothérapie. Nous attendons les premiers résultats pour les deux autres groupes dans 18 à 24 mois).

Cinq ans après le diagnostic de la maladie, 99,3% des patientes de bas risque étaient indemnes de métastases et 98,6% n’avaient pas rechuté localement (sur le sein opéré).

En cancérologie, ce type de résultat est tout à fait exceptionnel. Bien sûr, nous attendrons les résultats à 10 ans, mais nous savons que l’impact d’une chimiothérapie se juge dans les 5 premières années.

Oncotype DX à bas risque, la chimiothérapie n'est pas une option, mais un danger !

Concrètement, ce résultat de 99,3% montre que pour ces patientes à bas risque une chimiothérapie aurait été parfaitement inutile, mais aussi néfaste. Les effets secondaires, les risques à court, moyen et long terme liés aux chimiothérapies (bien que minimisés par les prises en charge actuelles) auraient dégradé ce résultat.

L’étude montre aussi, et ce n’est pas rien, que le résultat du test Oncotype DX n’était pas prévisible par les éléments généralement utilisés par les cancérologues pour décider d’un traitement. Ni la taille de la tumeur, ni son grade, ni l’âge de la patiente ne permettait de présager du résultat.

En clair, cela signifie que toutes les patientes éligibles au test devraient en bénéficier, sans faire de sélection a priori.

Les chimiothérapies sauvent des milliers de vies. Chaque année dans le monde, des hommes et des femmes continuent à vivre, à travailler, à jouir de leur famille et de leurs amis grâce à ces traitements. Pour autant, une des grandes avancées de ce 21ème siècle est l’irruption du concept de médecine personnalisée : ne traiter que celui qui doit l’être et d’une manière adaptée.

L’étude des gènes (de l’individu ou de la tumeur) est un des moyens les plus aboutis pour mettre en œuvre ce concept. Nous sommes à la veille d’immenses bouleversements qui concerneront tous les pans de la santé (vieillissement, diagnostic prénatal, cancers). Nous nous devons de relever cet immense défi, d’en comprendre les enjeux. Et pour ce qui concerne le cancer, ne pas rajouter inutilement du drame au drame.


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