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  • Daniel ZARCA et Marc-David BENJOAR

La reconstruction mammaire immédiate : la règle, pas l'exception


Après ablation du sein (mastectomie), la Reconstruction Mammaire Immédiate (au cours de la même intervention) devrait constituer une règle et non une exception. C’est la conviction et c’est également la pratique de l’équipe de l’Institut Français du Sein.

Les enjeux humains sont forts, suffisamment forts, pour qu’on étudie de près les freins à cette pratique et la manière de les desserrer.

Nous avons vu, dans un post précédent, les indications « orthodoxes » de Reconstructions Immédiates après ablation du sein : les cas (rares) où une radiothérapie n’est pas envisageable après l’intervention. Pour toutes les autres situations, la reconstruction du sein est proposée secondairement (en général pas avant 6 mois ou 1 an après la mastectomie).

En parcourant les premières lignes de ce post et le contenu du post précédent, on remarquera que la plus grande part du débat médical sur la Reconstruction Immédiate s’articule autour de la radiothérapie.

Sans entrer dans les détails, la radiothérapie est un traitement très efficace dont le but est de diminuer le taux de récidives locales (c’est à dire sur le site et autour de la tumeur). La radiothérapie est un des 3 grands piliers de la lutte contre les cancers (avec la chirurgie et les traitements médicaux). Mais, comme tous les traitements du Cancer, la radiothérapie génère des effets indésirables. Elle modifie les tissus traités (peau, graisse, muscle) les rendant plus rigides, moins irrigués par les vaisseaux sanguins. Et ces modifications sont, pour une grande part, permanentes.

- Lorsque le sein est conservé, la radiothérapie est systématique. Elle diminue très fortement le risque de récidive.

- Dans le cas des mastectomies, à l’inverse, la radiothérapie n’est utile que pour les situations à risques. C’est à dire des tumeurs plutôt agressives qui nécessitent absolument des traitements complémentaires pour être guéries (nous en guérissons vraiment beaucoup).

Ces tumeurs à risques nécessitent une radiothérapie et souvent une chimiothérapie.

Peut-on savoir, avant d’opérer, si une radiothérapie va s’avérer nécessaire ?

C’est une problématique spécifique de la Reconstruction Mammaire Immédiate. La chirurgie qui va être effectuée dépend de la réponse à cette question. Les séquelles liées à la radiothérapie modifient profondément les conditions de la Reconstruction du Sein.

Pour ce qui concerne la radiothérapie, 4 situations sont à différencier :

Situation n°1 : Carcinome In Situ.

On l’a vu dans le post précédent : pas de radiothérapie prévisible.

Situation n°2 : Récidive après traitement conservateur du sein.

La radiothérapie a déjà été effectuée dans le passé : pas de radiothérapie possible.

Situation n°3 : Tumeur à l’évidence agressive.

Chimiothérapie et Radiothérapie indispensables.

Situation n°4 : Tumeur en apparence peu agressive.

Radiothérapie envisageable, mais non certaine.

La situation N°4 est la seule à faire naître une incertitude sur l’indication d’une radiothérapie. Les 3 autres situations sont claires.

Ce qui ferait prescrire une Radiothérapie

a) la grande taille de la tumeur (>5 cm),

b) la multifocalité (c’est à dire plusieurs tumeurs dans le sein)

c) la présence de facteurs d’agressivité dans la tumeur,

d) l’envahissement des ganglions de l’aisselle.

a et b : Taille de la tumeur et multifocalité.

Les techniques actuelles, la qualité des machines et des équipes, (échographie, mammographie, IRM) rendent l’imagerie préopératoire très performante. Taille et multifocalité sont bien appréciées avant la chirurgie.

c : Facteurs d’agressivité.

Les biopsies pré-opératoires rendent compte de cette agressivité. Nous avons la chance d’avoir, en France, des équipes d’anatomo-pathologistes de haut niveau. Les échantillons prélevés au cours de la biopsie sont représentatifs du reste de la tumeur.

d : Envahissement des ganglions de l’aisselle.

Même si l’imagerie nucléaire (TEP-FDG), l’imagerie conventionnelle (échographie), l’imagerie interventionnelle (biopsies) et l’IRM améliorent progressivement leurs performances, le seul vrai moyen de détecter un envahissement des ganglions de l’aisselle demeure la chirurgie. Cette chirurgie est relativement simple depuis l’avènement des techniques de ganglions sentinelles.

L'ablation du ganglion sentinelle avant la Mastectomie

Taille, multifocalité et agressivité de la tumeur sont bien appréciées avant la chirurgie.

La radiothérapie va donc se décider sur l’atteinte ou non des ganglions de l’aisselle.

L’équipe de l’IFSein a donc souvent recours à une intervention préalable. : l’exérèse du ganglion sentinelle.

C’est une intervention rapide qui se déroule en chirurgie ambulatoire et dont les résultats sont vite obtenus.

Pour cette situation n° 4 : à l’issue de cette procédure du ganglion sentinelle, nous possédons donc généralement tous les éléments pour savoir si une radiothérapie post-opératoire va être proposée.

La Radiothérapie au cas par cas

1) Pas de radiothérapie : patientes en situation n°1 et une partie des patientes en situation 4 : celles dont le ganglion sentinelle est indemne.

Toutes les techniques de reconstruction sont donc théoriquement possibles (prothèse, lambeau libre, lambeau pédiculé). Nous verrons dans un prochain post les éléments du choix de la technique.

2) Radiothérapie déjà réalisée avant la mastectomie : patientes en situation n°2 (récidive locale)

Dans ces cas, la reconstruction par prothèse est déconseillée. Techniques possibles : lambeaux libres et pédiculé.

3) Radiothérapie prévue (très généralement associée à une chimiothérapie) : patientes en situation 3 et une partie des patientes en situation n°4 : celles dont le ganglion sentinelle est touché.

La Reconstruction Mammaire Immédiate à l’Institut Français du Sein

De manière « orthodoxe » les équipes finissent leur séquence de traitements par la radiothérapie. Cette pratique est ancienne et héritée d’une période ou la Reconstruction Mammaire était peu ou pas développée.

L’équipe de l’IFSein (et elle n’est pas la seule dans ce cas) inverse la séquence.

La radiothérapie est effectuée AVANT la chirurgie et non pas après. Au cours de cette séquence dite « inversée », il est possible d’effectuer une Reconstruction Mammaire Immédiate.

Le timing de la séquence doit être rigoureux. La date de la chirurgie (mastectomie et reconstruction au cours de la même intervention) est strictement fixée 4 à 6 semaines après la radiothérapie. Seules techniques possibles de reconstructions : lambeaux libres et pédiculés.

Par l’analyse rigoureuse des situations, par le respect strict des timings de traitement, il est donc possible de proposer une Reconstruction Mammaire Immédiate à la plupart des patientes qui ont besoin d’une mastectomie.

« Jamais sans mon sein » pourrait donc devenir un slogan.

Nous verrons, dans un prochain post, les techniques de Reconstruction avec pose d'implants mammaires (prothèses) et les raisons qui nous amènent à y renoncer souvent.

Nous évoquerons aussi la place des prothèses d'expansion provisoires (expandeurs) et la possibilité, grâce à elles, d'effectuer des Reconstructions Mammaires Immédiates dites "différées".


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